Léo Amery, vitrail d'art contemporain.
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La Maison De Détails

(H 2,33 m, l 1,65 m, L 2,30 m )

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« La Maison De Détails » est née de l’observation de la perception des enfants autistes, particulièrement de notre fils aîné, Joey, 15 ans, non verbal avec des difficultés d’apprentissage.
Certains adultes autistes ont décrit leur « vision en détails » comme opposée à « une vision globale » commune aux neurotypiques, c’est à dire ceux qui ne sont pas autistes. Une simple façon d’expliquer est d’imaginer que vous marchez dans un lieu public et voyez beaucoup de personnes. Un neurotypique voit exactement qu’il s’agit de beaucoup de personnes, un autiste peut voir par exemple, un T-shirt rouge, un bonnet vert, une tête blonde, une publicité de boisson sur un mur, les lignes du sol et une paire de chaussures en cuir bleu. En d’autres mots : une collection de détails.

« La Maison De Détails » commence ici comme une collection de détails sans aucune logique narrative ou connexion visuelle entre eux. Il ne s’agit pas de décrire ou d’expliquer la perception autistique, ou les deux, ce serait présomptueux et incorrect. Il y a peut-être autant de formes de perception autistique que d’individus dans ce spectre (environ 1 sur 150 naissances).

L’entrée à « La Maison De Détails » comme pour la perception visuelle est L’Oeil. Cet Oeil abstrait est criblé de verres de lunettes de Joey, certains portent les cicatrices de ses nombreuses chutes. Les autres détails ont été sélectionnés à partir d’une accumulation naturelle de morceaux de verre amassés depuis plusieurs années dans l’atelier.

Souvent les gens pensent que les autistes sont « dans leur monde », « dans leur bulle », « isolés » etc… C’est peut-être le contraire. Car nous, les « neurotypiques » créons volontairement un monde intérieur différent du monde extérieur. Dans beaucoup de professions, c’est une habileté nécessaire que d’être capable de penser une chose et d’en dire une autre et nos relations sociales sont souvent compliquées par la façon dont nous cachons ou protégeons nos vraies pensées ou sentiments. Cette qualité est peut-être impossible ou certainement moins facile pour les personnes autistes. Ce fait m’a amené à réaliser une installation où l’intérieur et l’extérieur sont une seule et même chose. Mon idée de départ était de faire un intérieur blanc avec seulement des détails. Il y a un intérieur et un extérieur mais le contenu ne change pas.

Pour certaines personnes, la première fois qu’elles entreront dans « La Maison De Détails », elles ressentiront peut-être brièvement, un sentiment invasif à cause d’une quantité d’informations visuelles auxquelles il n’est pas facile de donner un sens. Cela est peut-être une perception permanente pour certaines personnes autistes.

Je pense à quatre sources majeures d’inspiration qui influencent mon travail. La nature, le verre, la main et l’atelier.

La Nature. Le contact avec la nature, y vivre, s’y promener, est vital dans ma vie et dans mon travail. Observer, réfléchir, avoir le temps et l’espace pour penser et exister fait partie du dialogue et du questionnement essentiel au travail artistique.
En 1987, j’ai déménagé dans un lieu assez isolé dans le sud-ouest de la France. Ce paysage avec de vastes cieux et espaces, le causse avec ses chênes et genévriers, les vallées fertiles et ses grandes rivières, sa richesse en faune et flore est une source infinie d’inspiration. Beaucoup de mon travail est dérivé de l’influence ou de mon expérience avec ce paysage.
Bien que la matière principale que j’utilise soit le verre, j’associe aussi d’autre matériaux : cailloux, plumes, fils métalliques et autres métaux, végétation, os etc… que je collecte lors de mes ballades ou de mon travail autour de la maison.

Le Verre. Le verre est une source particulière d’inspiration. La transmission et la réflexion de la lumière, sa force physique et sa nature intangible, le pouvoir et la richesse de la couleur du verre, la subtilité des teintes révèlent des possibilités infinies. Il y a un sens à construire et à sculpter avec la lumière. La fragilité du verre avec son attraction hypnotique associée à la souplesse du plomb et sa solidité donne une combinaison extraordinaire de matériaux.

La Main. Mes origines dans les métiers d’art et son travail manuel, sont aussi importants. Bien que les idées conceptuelles peuvent nourrir mon travail, souvent il est nourri par les jugements que je porte sur mes propres actions. Parmi les activités humaines auxquelles j’apporte une grande importance, il y a le travail de la main.
Notre société porte une grande valeur à la parole, souvent en reléguant la valeur et l’intelligence de la main et des autres formes de communication non verbale. La sensation du verre ou du plomb dans la main et la satisfaction du travail de la matière, ont tous les deux, une dimension physique et spirituelle. Les nombreuses techniques que j’utilise restent fidèles à la fabrication traditionnelle du vitrail : coupe du verre et peinture, fusing, sablage, gravure à l’acide et thermoformage. Elles complètent une panoplie de méthodes pour transformer le verre.

L’Atelier. Finalement, l’atelier lui même est source d’inspiration, c’est le lieu où je me sens le plus à la « maison », à la fois libre et engagé. Ici je suis entouré d’une multitude de matériaux, d’outils avec de l’espace pour dessiner et travailler. Ainsi, peut-être, je me rapproche du petit enfant jouant, dans son monde imaginaire, sans aucune notion du temps qui passe, juste absorbé par le jeu.
La plupart de mes œuvres sont destinées à être suspendues sur le mur et, ce qui est inhabituel pour le vitrail, d’être éclairées de face. Chaque pièce est décalée du mur de plusieurs centimètres permettant ainsi la réflexion des couleurs du verre sur la surface derrière. Même avec une source de lumière artificielle, le passage de la lumière se fait tout en gardant la dynamique essentielle du vitrail.

Bagadou Bas, septembre 2013

 

© Vincent Marcel 2004